Dès 2013, l'année de son arrivée aupouvoir, le président chinois lançaitune vaste réflexion sur la modernisationde l'industrie. Son modèle? Le plan Indus-trie 4.0, adopté la même année par l'Alle-magne pour favoriser l'intégration par l'indus-trie traditionnelle de l'Internet des objets.Après avoir fait plancher quelque 150 cher-cheurs, universitaires et hauts fonctionnaires en2014,le plan chinois est officiellement adopté en2015 par le gouvernement. Il recense dixsecteurs-clés dans les quels la Chine doit à la foismonter en gamme et moins dépendre de l'étran-ger. Des technologies de l'information aux équi-pements énergétiques, de la biopharmacie auxtransports, Made in China 2025 (MIC25) couvrela quasi-totalité des champs industriels. C'estune composante-clé du « rêve chinois » du pré-sident Xi Jinping : faire de la Chine la premièrepuissance mondiale à l'horizon 2050.Mais peu à peu, l'Occident se réveille. Tantle patronat allemand que les Etats-Unis s'in-quiètent. Le 22 mars 2018, l'administrationaméricaine publie un volumineux rapportcontre les pratiques jugées déloyales de la Chineen matière commerciale. Made in China 2025 yest cité ou évoqué à 116 reprises. Le même jour,Donald Trump lance les presnières sanctionscontre Pékin. La guerre commerciale et techno-logique entre les deux principales puissancesmondiales est déclarée.Consciente d'avoir fait un faux pas diplo-matique, la Chine ne braque plusles projecteurssur MIC 25. Dès juin 2018, la presse chinoisereçoit comme instruction de ne plus évoquer cepan. Mi-décembre 2018, on apprend que MIC25ne figure plus dans les priorités imposées par legouvernement central aux provinces chinoises.Mais nul ne s'y trompe : les objectifs initiauxn'ont pas disparu pour autant. Une grandebanque publique chinoise a d'ailleurs encorefait la promotion de ce programme auprès deses clients en décembre 2020. La guerre com-merciale et technypogique a au contraireconvaincu la Chine qu'elle devait accélérerautant que possible la montée en gamme deson industrie et réduire sa dépendance del'étranger dans certains secteurs-clés, notam-ment la fabrication de puces électroniques, letalon d'Achille de son industrie.Pour les dirigeants chinois, c'est aussi unequestion de souveraineté. La modernisationde l'industrie accompagne celle de l'Arméepopulaire de libération (APL), qui doit devenirune « armée de classe mondiale » d'ici à2049 - une priorité de Xi Jinping, égalementchef des armées.=Frédéric Lemaitre, Pékin,correspondant